Inspiration: Women We Love

Isabel Allende

La célèbre romancière sud-américaine aborde la passion, le vieillissement et ce qui l'aide à se sentir belle.

Il y a sept ans, quand l'auteure chilienne Isabel Allende a été invitée par l'organisation à but non lucratif TED pour parler de « passion » lors de l'une de ses conférences renommées de partage d'idées, son discours de 18 minutes a évoqué avec humour et émotion la beauté, le vieillissement et le féminisme. L'engagement d'Allende pour TED a connu un tel succès qu'au printemps dernier elle s'est vue conviée une nouvelle fois pour parler de ces sujets à l'occasion du 30e anniversaire du groupe.

À 71 ans, Allende a encore beaucoup à dire sur le sujet. « Quand vous dépassez un certain âge [en Amérique], la simple idée d'essayer d'avoir l'air bien vous semble ridicule » insiste-t-elle, faisant ensuite remarquer que le vieillissement est un processus lent et qu'il ne se déclenche pas d'un seul coup, à votre 70e anniversaire. « Vous commencez à vieillir dès votre naissance ! »

Vous commencez à vieillir dès votre naissance !

Sa curiosité, son mariage et son maquillage, ainsi que son engagement envers son art, aident Allende à se sentir passionnée et belle encore aujourd'hui : « Je ne voudrai jamais prendre ma retraite, parce que je fais ce qui me plait le plus » explique l'auteure de La maison aux esprits et d'Eva Luna. (Son dernier livre, un roman noir intitulé El juego de Ripper, a été salué plus tôt cette année). L'engagement perpétuel d'Allende dans sa Fondation est également essentiel pour maintenir sa joie de vivre. « Cela m'aide à garder les pieds sur terre » a-t-elle confié au sujet de son projet de responsabiliser les jeunes filles et les femmes, lancé en 1996 en hommage à sa fille Paula, décédée à l'âge de 28 ans. Ici, la reine du réalisme magique poursuit la conversation avec The Estée Stories.

EL: Votre nouveau livre, El juego de Ripper, traite entre autres des jeux en ligne et de l'ère numérique. La technologie a-t-elle influencé votre façon d'écrire et votre manière de conceptualiser vos idées ?

IA : Pas vraiment. J'écris en effet à l'ordinateur, mais la technologie n'écrit pas le livre ; il s'agit d'un processus vraiment lent et très semblable à l'écriture manuelle. En revanche, la technologie me permet de rester connectée à mes lecteurs. Ça, ce n'était pas possible avant. Avant, je recevais du courrier postal - énormément - mais répondre à ces lettres me prenait un temps fou. Maintenant, j'ai des réactions directes. Je tiens une page Facebook et un blog, des outils vraiment efficaces qui incluent le lecteur. J'adore le fait de pouvoir savoir ce que les lecteurs aiment et ce qu'ils lisent.

Isabel Allende chez elle en Caroline du Nord, 2014,

EL : Votre discours pour TED a eu un tel succès en ligne qu'ils vous ont rappelée une deuxième fois ! Comment parvenez-vous à entretenir la passion à 71 ans, un âge où elle devrait au contraire se refroidir, à en croire la société ?

AI : Comment entretenez-vous la flamme ? Eh bien, comment restez-vous en vie ? Tant que je vivrai, j'aurai des passions. J'ai la chance d'être en bonne santé, d'être active et d'adorer mon métier. Et j'ai la chance de vivre un mariage heureux. Je pense qu'une relation, quand elle est réussie, est magnifique. Cela vous permet de rester intéressée.

EL : Notre société fixe des règles semblables au sujet de la beauté ; selon elle, lorsqu'on arrive à un certain âge, elle disparaîtrait.

IA : Eh bien, je serai toujours une étrangère dans ce pays. Je n'aurai jamais l'air d'une Américaine, donc je n'aurai jamais à suivre ces « règles » ! Mais je ne m'en fais pas à ce sujet. J'aime sentir que j'ai l'air le mieux possible, étant donné les matières premières dont je dispose. Ainsi, je ne porte pas de vêtements très moulants parce que je ne me sens pas à l'aise dedans. Je suis très petite, donc je porte des talons. Je dois faire attention à ne pas mettre de vêtements ou de couleurs qui me tassent. Le maquillage fait partie de ma routine quotidienne - exactement comme prendre une douche ou me brosser les dents.

EL : Vous vous maquillez donc tous les jours ?

IA : Chaque jour que Dieu fait. Je travaille de chez moi et je n'ai que 17 pas à faire jusqu'à la casita où je travaille, à l'arrière de la maison. Mais à mon réveil, chaque matin, je fais des exercices, je médite, je prends une douche et je promène le chien totalement maquillée - avec fond de teint et tout.

Je dirais à mon moi plus jeune de ne pas tant me presser.

EL : Quels sont vos produits indispensables ?

IA : J'utilise la BB crème d'Estée Lauder parce qu'elle hydrate, contient une protection solaire et peut servir de base. Elle égalise le teint. Ensuite je maquille mes yeux, mon seul atout ! Je mets parfois du baume à lèvres transparent. Je reviens juste de Turquie. Nous étions en bateau, et au saut du lit, avant même le petit-déjeûner, je plongeais dans l'eau. Mais dès que j'étais sortie de l'eau, je me maquillais et j'enfilais une longue jupe.

EL : L'une des parties les plus drôles de votre premier discours chez TED, c'était lorsque vous citiez Sophia Loren selon qui sa « posture » et le fait de « ne pas faire des bruits de vieille personne » l'aidaient à avoir l'air jeune. Avez-vous quelques conseils pour vieillir en beauté ?

IA : Je n'en ai pas vraiment, mais pendant ce voyage en Turquie, j'étais avec cinq couples - toutes des femmes de mon âge - et chaque soir, nous prenions un verre en discutant d'un sujet. Un soir, l'une de ces conversations a porté sur le vieillissement. Une autre fois, nous avons parlé du bonheur. Nous avons conclu que les personnes qui avaient vraiment l'air bien et se sentaient bien étaient celles qui s'aimaient. Quand vous vous aimez vous-même, vous vous sentez à l'aise dans votre corps et vous êtes bien.

Quand vous vous aimez vous-même, vous vous sentez à l'aise dans votre corps et vous êtes bien.

EL : Quel conseil donneriez-vous à votre « vous » de 25 ans ?

IA : Je dirais à mon « moi » plus jeune de ne pas tant se presser. Ne te sens pas obligée de toujours accomplir quelque chose. Ne sois pas si disciplinée, si ponctuelle. Qui s'en soucie ? Apprécie simplement plus la vie. Je pense que ma vision de la vie a vraiment changé à la mort de ma fille. C'était l'année de mes 50 ans. J'ai pris dix ans en une seule année, et quelque chose a changé en moi. Je suis devenue plus mature, j'ai appris à lâcher du lest à propos de beaucoup de choses. Depuis, je pense que je lâche du lest un peu chaque jour. Maintenant, je suis beaucoup plus détendue.

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